BAL 2023 : Pabi Guèye, la persévérance gratifiée

C’est un jury composé de journalistes, techniciens et autres acteurs de la BAL qui a fait de Mamadou Gueye son premier choix de draft. Cela confirme tout le bien que l’on pense de cet entraineur, dont les qualités techniques, les capacités managériales et le sens de la responsabilité ne sont plus à démontrer. 
Le natif de Guinguinéo a su hisser l’AS Douanes en finale de cette 3ème édition de la Basketball Africa League. Et c’est peu dire que ce n’était pas du tout facile avec deux revers d’entrée dans la Conférence Sahara. «Pabi» a fait les réajustements nécessaires pour gagner les trois derniers matchs en éliminant au passage le tenant du titre, l’US Monastir. Pour sa 2ème participation à la BAL, l’AS Douanes se retrouve en quarts de finale comme en 2021. 
En quarts de finale, les Gabelous se promènent devant Ferroviario Beira (93-73). Ils héritent de l’ogre Petro de Luanda en demi-finale. Certains sceptiques ne croyaient pas aux chances de la formation sénégalaise. Mais Mamadou Guèye «Pabi» n’a rien à envier au «sorcier blanc» sur le banc du club angolais, le Brésilien Jose Neto. Le Thiessois et fils de cheminot sait comment s’y prendre. En bon stratège, il fait déjouer Neto en muselant ses meilleures armes offensives Carlos Morais et Childe Dundão. 
Les victoires contre US Monastir et Petro Luanda ont montré à la face du monde la qualité du technicien sénégalais qui se la joue modeste. «Cette qualification en finale me conforte encore sur le choix de Sir Parfaito Adjuvon. Il m’apporte beaucoup dans les vidéos, l’analyse des matchs et autres. Il suffit juste que je regarde un match pour savoir comment l’appréhender.  Alex Adams et Bouba Sarr sont aussi importants car je travaille au quotidien avec eux.  (…). Je suis un grand paresseux. Je ne suis pas un coach de vidéo. Je suis très content et cela veut dire qu’on travaille bien au niveau local, malgré le statut amateur de notre championnat. Les techniciens sénégalais font tout pour gagner en expérience et on s’imprègne de ce qui se fait de mieux dans le monde», disait-il après la victoire face au Petro.

Une vie dédiée au basket…
Comme tous les jeunes sénégalais, le sport fait partie de son quotidien. Il a appris les fondamentaux du basket très tôt et y a pris goût au fil des années. «Pabi» Guèye a décidé d’arrêter les études en classe de 3ème, en 1995.  «J’ai quitté l’école le jour du brevet. J’ai fait quelques matières le matin et je ne suis pas retourné l’après-midi. Ma mère était surprise, mais j’avais une bonne raison. Je devais aller en France dans une école études-sport et tout était bien ficelé. Malheureusement, l’affaire a capoté car mon père est parti à la retraite quelques mois après et il n’avait pas dans la possibilité de me payer ce voyage. C’est ainsi que j’ai quitté l’école. Je faisais partie des meilleurs de ma classe. J'avais de bonnes notes dans toutes les matières», disait-il en 2013 dans «La reconversion des sportifs sénégalais :  entre réussites et échecs», mémoire de grande enquête de Mor Bassine Niang pour l’obtention du DSJC du CESTI. 
Mais, loin de cette carrière tant rêvée, il vit sa passion à travers le coaching. Et, pour dire le moins, les résultats sont à la hauteur. Pour sa première année à la tête de l’AS Douanes, en 2013, il a remporté les Coupes du Sénégal et du maire de Dakar. Sous son magistère, l’AS Douanes a étrenné 6 titres de champion : 2014, 2016, 2017, 2018, 2019, 2022 ;  5 coupes du Sénégal : 2013, 2014, 2017, 2019, 2021, sans oublier les trophées Saint-Michel et maire. Pabi Guèye a été élu 5 fois meilleur entraineur du championnat sénégalais : 2016, 2017, 2018, 2019 et 2022. Ce trophée de «coach of the year de la BAL» réconforte le choix de ses pairs.   Il est dans le staff technique des Lions du basket depuis 2017. Médaillé de bronze de l’Afrobasket masculin 2021, le papa de Mignel et Zahra a été champion d’Afrique U18 en 2012 en étant l’assistant de Madiène Fall. 
Le succès ne lui fait pas perdre la tête. «J’essaie tout simplement de vivre ma passion du jeu. Je ne connais que le basket et je veux transmettre ma courte expérience aux jeunes. J’ai beaucoup appris auprès des grands coaches sénégalais et étrangers.  En plus, je me perfectionne chaque jour pour être parmi les meilleurs», martèle le technicien de 2ème degré depuis 2013. 

L’ami et le mari idéals
Sur le terrain, il a toujours le visage fermé et ne sourit presque jamais. Ce n’est pas une sévérité, mais sa marque de fabrique. L’homme est exigeant et perfectionniste. «On est ensemble depuis notre enfance. Nos pères étaient des cheminots. Je suis bien placé pour parler de lui. Je suis allé demander la main de son épouse. Mon fils aîné porte son nom. On a des relations très étroites. Il est parfois bouillant mais je sais comment le gérer. Je trouve tout le temps les mots justes pour le calmer. Il aime que les choses soient bien faites mais c’est un homme entier. Il partage tout avec les autres. Il peut avoir un million et donner ça et se retrouver avec zéro franc. Cette générosité qui fait sa force. Il ne s’occupe pas de la vie des autres. Il est toujours dans le positif. C’est un homme humble et très bien éduqué. Il m’est difficile de parler de lui. Nos familles sont inséparables. Il mérite amplement cette distinction. Je suis certain qu’il va aller loin dans sa carrière», confie son meilleur ami Pape Bouba Sarr, coach assistant de l’AS Douanes. 
Marié et père de deux charmantes filles, Mamadou Guèye est un mari attentif et dévoué pour la cause familiale. Les témoignages sont de son épouse, Seynabou Barry. «Cette distinction ne me surprend pas. Il a aimé le basket depuis son enfance. Il nous a fait aimer cette discipline. On vit et respire basket. Je suis fière de lui. Ses filles et toute sa famille le sont aussi. C’est un mari attentif, aimable, dévoué et très respectueux. Il est toujours au chevet des autres et de sa famille. Tu as toujours cru en toi. Tu t’es battu pendant des années pour être à ce niveau. On prie fort pour que l’AS Douanes gagne le trophée pour le bonheur de tous les Sénégalais. Je t’aime fort monsieur mon tendre et doux mari». 
Bouna FAYE, 
correspondance particulière à Kigali (Rwanda)