Piégés par La Marine, les trafiquants jettent la drogue en mer
jeudi 1 avril 2021 • 2241 lectures • 1 commentaires
Société 2 ans Taille
Un navire Turc portant enseigne «Mv-Rona» a été intercepté en haute mer par la Marine nationale. L’embarcation en provenance des Pays-Bas convoyait une forte cargaison de cocaïne qui sera précipitée à l’eau par les membres de l’équipage. Arrêtés, ils ont été déférés, lundi dernier, au parquet de Dakar.
Un navire étranger immobilisé au port de Dakar pour trafic international de cocaïne. Le fait passé à une certaine époque (courant 2019-2020), pour anodin, suite à la cascade de saisies de drogue dure au Port autonome de Dakar. La dernière grosse saisie de 120 kg de cocaïne est signée le 28 janvier 2020, à bord du navire Grande Nigeria. Après une accalmie d’un an, quatre mois, le Port autonome de Dakar a donc renoué, le 22 mars dernier, avec «ces vieux démons». Un navire turc, en provenance des Pays-Bas, est immobilisé depuis ce jour, au Môle 2, après avoir été intercepté en haute mer, à la frontière mauritanienne, par la marine nationale.
Les minutes de l’interception du navire voyou turc à la frontière mauritanienne
L’immobilisation de ce navire turc est le fruit d’une mutualisation d’actions triangulaire entre la marine nationale, des entités locales spécialisées dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, dont l’Ocrtis, l’Umcc… et leurs partenaires étrangers. Une synergie qui a permis de recueillir une manne d’informations sur le navire à l’enseigne «Mv-Rona», catalogué «navire-voyou» pour ses multiples prestations criminelles à travers le monde, relatives au trafic international de drogue dure. Figurant depuis lors, dans le viseur des agences de la coopération policière internationale, le navire «Mv-Rona» est localisé courant février dernier, par le renseignement international, aux Pays-Bas. Si le renseignement s’est à nouveau intéressé au navire Turc, c’est parce qu’il «venait d’embarquer une forte cargaison de cocaïne dont la destination finale est un pays de l’Afrique de l’Ouest». Des informations qui seront constamment mises à jour et progressivement transmises à la marine nationale pour des missions opérationnelles en mer. Le 20 mars dernier, le navire Turc «Mv-Rona» est localisé dans les eaux mauritaniennes, où il marque une escale. Deux jours après, l’embarcation quitte Nouakchott, emprunte les eaux internationales, avant de faire cap vers le Sénégal. La marine nationale qui avait des informations détaillées sur la feuille de route du navire Turc, poste l’un de ses patrouilleurs, le «Fouladou», à la frontière avec la Mauritanie. La mission consistait à intercepter le navire suspect et à l’arraisonner pour mettre la main sur sa cargaison suspecte de cocaïne.
La vidéo montrant des sacs suspects jetés précipitamment en mer
Ce que les commandos marins du patrouilleur «Fouladou» vont faire le 22 mars dernier. Le navire «Mv-Rona» est repéré en haute mer dans les eaux sénégalaises, à la frontière avec la Mauritanie. Seulement, dès qu’ils ont aperçu le patrouilleur de la marine, les membres de l’équipage du navire suspect s’empressent, à tour de bras, de jeter plusieurs sacs suspects en mer. L’instant est filmé par les marins patrouilleurs au moment d’immobiliser le navire. Après avoir cerné les membres de l’équipage du navire, ils décident de perquisitionner plusieurs compartiments, sans succès. L’équipage avait (comme vu dans une vidéo), pris le soin de jeter l’ensemble du stock qui se trouvait à bord en mer.
N’empêche, les 5 membres de l’équipage sont interpellés par la marine qui réquisitionne le navire suspect et l’achemine au Port de Dakar. Sur place et pour les besoins de l’enquête, les 5 membres de l’équipage sont mis à la disposition des limiers de l’Ocrtis. Il s’agit du capitaine Turc du navire, H. Terzi, de l’ukrainien, H. Soloviov, du Géorgien, M. Nodar et des Sierra-Léonais, A. et A. A. Bangoura qui sont de la même fratrie. Au cours de l’enquête, H. Terzi et Cie nieront avoir convoyé de la drogue, précisant qu’ils venaient des Pays-Bas pour rallier la Sierra-Léone. Poursuivant l’enquête, les limiers de l’Ocrtis, les éléments de l’Umcc, la Douane et la gendarmerie procèdent à une seconde perquisition du navire, revenue infructueuse.
Le capitaine du navire craque et déballe
Pressé de questions, le capitaine du navire, H. Terzi finit par craquer. Il balance ainsi son patron, Y. Huseyn, résident en Turquie. Loquace, Terzi révèle que son big boss possède une flotte de 3 navires de la dimension du «Mv-Rona». Il précise que les deux autres navires sont actuellement recherchés par plusieurs polices, pour trafic international de drogue. Mieux, Terzi révèle qu’en mai dernier, il a piloté l’un des navires de son patron portant enseigne «A. K», qui a convoyé 23 tonnes de cocaïne du Détroit de Gibraltar (Maroc) à Malaga (Espagne). Le capitaine H. Terzi livre ensuite une autre révélation de taille. «Mon compatriote, M. Luka qui se trouvait dans le troisième navire du boss, m’a rapporté, en septembre dernier, que ce navire avait reçu au large du Cap-Vert, 1,600 tonne de cocaïne débarquée d’une autre embarcation en provenance du Brésil. La drogue qui devait être acheminée au Maroc a été jetée en mer, à 100 Km de Dakar, après qu’ils ont reçu une information selon laquelle, la marine sénégalaise était à leurs trousses.
L’exploitation des téléphones et l’arrestation de deux Sénégalais
Poursuivant leurs investigations, les limiers de l’Ocrtis vont, renseignent des sources de L’Observateur, exploiter des données électroniques et les téléphones portables des mis en cause. Une démarche qui a permis de relever des liens de complicité entre le capitaine, H. Terzi, les membres de son équipage et deux contacts sénégalais. Il s’agit de M. Konté et M. Ndiaye, tous deux employés dans une grande société de consignation de la place. Konté et Ndiaye seront piégés et interpellés. L’exploitation de leurs téléphones portables va établir un lien entre eux et le baron de la drogue, Y. Huseyn. Konté et Ndiaye seront indexés par les échanges (messages) entre le capo Turc et ses contacts sénégalais. D’ailleurs, ce sont eux qui vont informer le capitaine de l’interpellation des membres de l’équipage. Le boss envoie séance tenante 1 000 dollars (environ 550 000 FCfa) dans le compte de M. Konté destinés à «corrompre des agents ou au pire des cas à commettre des avocats pour tirer d’affaire ses employés.» Un montant que Konté ne peut encaisser puisqu’étant dans les liens de la détention. Tout ce beau monde est placé en garde à vue, avant d’être déféré le 24 mars 2020, au parquet de Dakar pour association de malfaiteurs, trafic international de cocaïne, blanchiment de capitaux.
Abdoulaye DIEDHIOU
Publié par
Namory BARRY
admin
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